Meurtre, bavures policières, insécurité et injustice dans le territoire sous l’État de siège.
26 avril 2022Le mouvement Citoyen LUCHA, Lutte pour le Changement, paie le lourd tribut.
A Beni, le 1er avril 2022, 12 militants du mouvement citoyen LUCHA ont été condamnés à 12 mois de prison ferme par le tribunal militaire de garnison de Beni. Ils sont accusés de désobéissance aux lois pour avoir dénoncé, à travers une marche pacifique, la persistance des tueries dans cette région. Selon Kivu security tracker, au moins 2563 civils ont été tués entre le 06 mai 2021 et le 25 avril 2022.

Le caractère arbitraire de l’arrestation de ces jeunes non violents, les conditions difficiles de leur détention, les irrégularités ayant caractérisé leur procès ainsi que ce jugement injuste ont entraîné une vague d’indignation venant des nombreux citoyens et d’organisations des droits de l’Homme comme Amnesty International, Human Rights Watch, Frontline Defenders ou Protection International. Monsieur Muhindo Kasekwa, député nationale élu de Goma, avait qualifié leur emprisonnement et leur condamnation d’injuste.
Le dossier de la seule femme du groupe, la 13e détenue d’opinion avait été disjoint en raison de son hospitalisation. Selon le médecin de l’hôpital psychiatrique où elle avait été internée, la perte de certaines de ses capacités cognitives aurait été entraînée par des coups reçus sur la tête pendant son arrestation et des conditions carcérales difficiles.
Le 24 janvier 2022, monsieur Ushindi Mumbere, un jeune membre de la LUCHA, a été abattu par balle lors des manifestations pacifiques appelant les autorités à trouver des alternatives crédibles à l’état de siège. Aucune enquête sur ce meurtre n’a été déclenchée. Le responsable du commissariat urbain de la police, le commissaire supérieur principal Jean-Sébastien Kahuma Lemba, avait formulé des menaces la veille des marches pacifiques en annonçant que “les manifestants ne reverront plus les membres de leur famille”. Le maire policier Narcisse Muteba Kashale avait déclaré devant la presse que leur principe est : « le chien aboie, la caravane ne peut pas passer. On arrête la caravane, on tue le chien. » En effet, durant la manifestation, les policiers ont tiré à bout portant sur les manifestants. Ushindi Mumbere a été touché d’une balle dans le ventre. Il en est mort.
A Goma, Mwamisyo Ndungo King, un militant de la LUCHA a été arrêté le 02 avril 2022. La justice militaire qui le détient jusqu’à présent lui reproche de « dénoncer via les réseaux sociaux l’insécurité urbaine à Goma en dépit de l’état de siège ». Sur son compte facebook et twitter, il publiait quotidiennement un carnet des injustices de l’insécurité à Goma.
À l’exemple de la LUCHA au Nord Kivu, les défenseurs des droits de l’Homme et les organisations de la société civile qui portent un regard critique sur la gouvernance publique en cette période d’état de siège sont la cible d’attaques et menaces.
Le gouverneur avait invité les militants de la LUCHA pour discuter de la situation de la province. Pour lui, les militants doivent soutenir l’action de l’armée et laisser la justice faire son travail.
Les provinces du Nord Kivu et de l’Ituri sont sous état de siège depuis une année et elles continuent de subir des attaques de groupes armés.